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Les contrats Open-Bar bloquent le développement des PMEs françaises du logiciel
L'émission Cash Investigation du 18 Octobre a traité le sujet du contrat OpenBar de Microsoft avec le Ministère de la Défense, denoncé depuis des années par l'April.
Je suis heureux de voir cette émission, car XWiki, éditeur de logiciel libre de partage d'informations, se trouve confronté à ce type de contrats (pas seulement par Microsoft) qui nous bloquent régulièrement et nous empèche d'accéder à des marchés (publics et privés). Qui plus est quand on regarde de plus près, on voit que cela se fait au détriment de la concurrence, au détriment du client qui fini par payer plus cher la solution "Open Bar", et au détriment des utilisateurs des logiciels qui ont un moins bon service.
Si l'émission Cash Investigation a traité les contrats Open Bar sur l'aspect du prix et sur l'aspect de la sécurité informatique, elle n'a pas mentionnée:
- la distorsion de concurrence, en particulier vis à vis d'acteurs locaux et PMEs;
- l'insatisfaction d'utilisateurs face aux solutions imposées;
- le fait que cela existe aussi dans les entreprises et pas seulement au Ministère de la Défense et dans les services publics;
- l'effet "bundle" qui permet à Microsoft de pousser des nouveaux produits, de leur créer une base installée, sans mise en concurrence.
J'en profite donc pour relater mon experience et ma vision des contrats Open Bar qui empêche l'entrée de solutions concurrentes et en particulier Françaises (libres et non libres) aussi bien dans des entreprises publiques et dans les entreprises privées.
Qu'est-ce qu'un contrat Open-Bar
Un contrat Open Bar est un contrat négocié à prix fixe pour une période données (3 ans le plus souvent), permettant l'usage d'un ensemble de logiciels d'un fournisseur (Microsoft dans l'émission Cash Investigation) de façon illimitée. Dans le cas de Microsoft, cela veut dire, potentiellement beaucoup de logiciels, dont certains ou les entreprises concurrentes peuvent être des PMEs, françaises ou européennes par exemple.
Comme ça, ça à l'air sympa ! Open-Bar ! Mais comme pour l'Open-bar en soirée, le reveil est plus dur.
Quel est le piège de l'Open-Bar
Le piège est très simple. Au bout des 3 ans on fait les comptes. On regarde l'usage effectif, on fait une belle feuille de calcul (avec Excel puisqu'il est "gratuit"), on multiplie par les prix publics et on présente la note pour les 3 ans à venir, forcement largement plus chère que le contrat précédent. Mais comme le fournisseur est sympa il fait une petite réduction. Bien sûr on n'est pas obligé de signer, puisqu'il suffit de désinstaller tous les logiciels qui ont été installés pendant les 3 ans. Ah ben non, bien sûr, cela ne va pas être possible, on ne peut pas déinstaller des logiciels qui sont utilisés au jour le jour. Bon bien merci pour la réduction. On va renouveler comme ça, mais n'oubliez pas de nous inviter à la conférence à Las Vegas, ou encore mieux à la finale de l'EURO 2016.
Combien ça coûte un contrat Open-Bar
L'émission de Cash investigation à indiqué, dans le cas du contrat du Ministère de la Défense, le chiffre de 80MEuros pour le premier contrat de trois ans, et de 120MEuros pour le second contrat, soit 50% d'augmentation entre les deux contrats. C'est bien sûr la que ça coince. Le client est clairement en position de faiblesse, incapable ni de négocier réellement, ni de sortir du contrat. Le piège s'est refermé. Bien sûr on va se rassurer sur le fait qu'un seul fournisseur pour tous les logiciels, c'est plus simple et on espère qu'on fait des économies d'échelle et de gestion. Enfin on espère. Mais c'est sans compter sur les effets de bords de ces contrats, qui sont ceux qui concernent les PMEs concurrentes mais aussi les utilisateurs.
La distorsion de concurrence
C'est la, qu'une société comme XWiki, mais aussi des centaines d'éditeurs logiciels rien qu'en France, sont concernés par les contrats Open-Bar. Ceux-ci bloquent la concurrence et les effets sont désastreux aussi bien pour les concurrents que pour les clients eux-mêmes.
1/ Un département de l'entreprise à un besoin et regarde les solutions possibles.
2/ Il sélectionne quelques entreprises qui ont une solution qui semble bien adaptée.
3/ Il évalue le prix des solutions et la solution qui serait livrée en final.
4/ Il en parle à son département IT, qui lui indique qu'un logiciel Microsoft pourrait faire l'affaire, et celle-ci est "gratuite" (puisqu'Open-Bar).
5/ L'analyse montre que la solution est loin d'être idéale et pourrait avoir des coûts non-négligeables de services, plus importants que les services nécéssaires pour les solutions concurrentes.
6/ Le prix global des fournisseurs exterieurs (incluant prix du logiciel ou support pour les logiciel Open-Source), reste quand même plus cher, du fait de la "gratuité" supposée du logiciel "Open-Bar".
7/ De plus jamais le prix des logiciels "Open-Bar" ne seront directement facturés au services les utilisants, étant inclus dans un budget de fonctionnement global réparti au pro-rata des employés.
8/ Par contre le prix des logiciels et support concurrents sont directement supportés par le département utilisateur, si celui-ci souhaite réellement s'engager pour utiliser un "logiciel non-standard".
9/ Le département IT insiste fortement pour utiliser la solution "standard" entreprise malgré ses déficiences.
10/ Le client choisit la solution Open-Bar malgré le fait que cela ne répond pas aussi bien aux besoins et que les services sont plus chers.
11/ Au renouvellement du contrat Open-Bar, l'usage du logiciel est pris en compte, le tarif du logiciel peut être largement plus cher que les solutions concurrentes, même avec les discounts.
12/ Le prix global du projet peut être multipliés par 2, 3 voir 5 en final (le prix de la licence n'est pas négociée face à une solution concurrente)
13/ l'utilisateur final n'est pas satisfait car le logiciel n'était pas le meilleur, générant potentiellement d'autres sur-coûts.
13/ Tout cela c'est passé sans mise en concurrence sur le projet particulier dans le cas d'une entreprise publique.
14/ Les entreprises concurrentes et françaises en particulier n'ont pas eu le contrat, bloquant l'emergence de solutions concurrentes, renforcant la domination de l'acteur existant.
Ce cas est un cas presque "idéal" ou une solution concurrente a été un temps envisagée, mais la grande majorité des cas sera de ne même pas regarder les solutions concurrentes et de prendre dans le "pack", puisque c'est "gratuit".
Ce scénario, nous l'avons déjà vécu chez XWiki, alors que nous avions des utilisateurs finaux qui souhaitaient notre solution.
Que faut-il faire ?
Tout d'abord les entreprises doivent faire beaucoup plus attention à ces contrats qui sont faussement avantageux. Lors du choix d'une solution pour un projet, il ne doivent pas considérer dans leur analyse que le logiciel "Open-Bar" est "gratuit" et effectivement prendre en compte le coût futur.
Du côté marché public, si remettre en cause juridiquement cette pratique n'est pas possible (ce que je ne sais pas), les acheteurs doivent effectivement être vigilants car effectivement ils ne sont pas gagnants en final.
De façon générale il doit aussi y avoir une prise de conscience vis à vis des acteurs locaux et comprendre qu'acheter une pack complets de logiciel d'un coup pose un problème évident de concurrence et n'est pas dans l'interêt des clients à long terme. Ceux-ci doivent privilegier les standards et l'interopérabilité permettant d'utiliser des logiciels d'acteurs différents qui fonctionnent bien ensemble. Une stratégie long terme doit être mise en oeuvre afin de créer les conditions d'un marché concurrentiel.
Et bien sûr comme la Gendarmerie, dont le cas à été montré dans le reportage, les entreprises peuvent se diriger vers les logiciels libres qui sont une solution, cependant sans oublier de contribuer au financement ou au développement des ces logiciels, comme je l'ai déjà évoqué dans d'autres contextes:
http://archives.lesechos.fr/archives/cercle/2013/10/22/cercle_82665.htm
http://linuxfr.org/news/vivre-du-logiciel-libre-ludovic-dubost-nous-parle-de-sa-societe-xwiki-sas
Propositions concernant les logiciels libres, l'open access, l'open-data, les ressources pédagogiques libres, l'économie collaborative
Propositions dans les sections non spécifiques aux modèles ouverts
- Maîtriser la dette technologique de l'Etat par Ambition Numérique
- Adapter le logiciel libre aux besoins de l'État par Gami
- Prendre conscience du financement des logiciels libres que l'Etat utilise par Ludovic Dubost
- Exploiter les données de santé au service de l’intérêt général et dans une approche de bien commun par Ambition Numérique
- Réduire les dépenses informatiques en mutualisant davantage les fonctions « Systèmes d’Information » et en privilégiant le recours aux logiciels libres
- Favoriser l’utilisation et le partage libres des ressources pédagogiques par Ambition Numérique
- Construire une architecture distribuée par Adrien Fabre
- Un format libre et interopérable pour les profils sociaux par Julien Ente
- Propositions pour améliorer le financement des logiciels libres utilisés par l'Etat
- Accès par chaque utilisateur à ses données par API par lxtapa
- Chaque acteur donne aux utilisateurs une API d'accès et de modification à leurs données et algorithmes par lxtapa
- Imposer un accès aux données personelles par API par ldubost
- Il faut absolument mettre en avant au niveau de l'Etat et des grandes entreprises françaises le modèle Open Source en avant par spectre3brad
- Imposer des APIs pour accéder à ses données dans tout logiciel ou service en ligne par ldubost
- Considérer le numérique comme une infrastructure par ldubost
- Le modèle économique propriétaire freine l'innovation et l'appropriation par Jeannas Jean-Yves
- Le logiciel libre gratuit: création ou destruction de valeur par Emmanuel Gaudin
- Développer les modèles libres et ouverts par ldubost
- Ouvrir les informations Banque de France et INSEE par Gautier Mariage
- Abonder systématiquement par des fonds publics toute campagne de crowdfunding respectant des critères open préalablement définis par le rapport lemoine
- Lier les subventions publiques des établissements publics à la quantité d’open source et d’open access par le rapport Lemoine
- Entreprises du logiciel libre, énorme vecteur d'innovation, peu soutenues. par Vincent Carrera
Sections spécifiques aux modèles ouverts
Nouvelles Contributions au CNNum
Voici un petit résumé de mes contributions sur le site de la consultation du Conseil National du Numérique sur le numérique en France.
Nouveau modèles
Concurrence/APIs/Données
- Imposer des APIs pour accéder à ses données dans tout logiciel ou service en ligne
- Imposer un accès aux données personelles par API
- Le marché de la publicité par mot-clé n'est pas concurrentiel
- Dé-bundling du marché des réseaux de publicité par mot-clé et du marché des services Internet
Financement
- Le Financement par le Capital Risque crée des entreprises numériques déjà vendues aux acteurs US
- Mettre le paquet sur le crowdfunding
Soutien à l'innovation
- Aider les entreprises numériques, pas seulement leur R&D
- Commentaire sur Assurer une meilleure attribution des aides publiques
- Commentaire sur Une allocation encore peu optimale des aides publiques au soutien à la création d'entreprises innovantes
Financement des logiciels libres
- Prendre conscience du financement des logiciels libres que l'Etat utilise
- Propositions pour améliorer le financement des logiciels libres utilisés par l'Etat
Europe/International
- Absence de modèle d'entreprise Européenne
- Penser Européen
- Créer un statut d'entreprise innovante Européenne ou faire évoluer le statut d'Entreprise Européenne
- Favoriser la création d'entreprises multi-nationales
- Créer un acteur Européen de l'investissement et de l'aide publique à l'innovation
- Encourager et Favoriser la fusion d'entreprises numériques Européennes
- Commentaire: dommage de penser trop national
Considérer le numérique comme une infrastructure
Nous vivons une accélération foudroyante du développement des technologies numériques et d'Internet ainsi que de leur impact sur la société et l'économie.
La moitié des métiers actuels pourraient disparaître d'ici 20 ans (Atlantico, The Economist), et ce type de prédiction n'est pas isolée. Alors qu'il y a moins de 10 ans l'on considérait la voiture automatique comme impossible, la Google Car a maintenant réalisée de nombreux kilomètres sans causer d'accidents. Une généralisation de la voiture automatique pourrait représenter un progrès phénoménal tout en causant une déstabilisation significative des industries du transport.
Cet exemple montre la progression des technologies d'intelligence artificielle et l'impact possible des technologies sur l'emploi.
Si les nouvelles technologies permettent aussi de générer des nouveaux emplois, il semble cependant que la vitesse à laquelle les nouvelles technologies changent le monde est tellement rapide, que les personnes impactés par ces changements ne pourront pas s'adapter assez vite.
D'autre part le contrôle de technologies disruptives à ce point par un nombre faible d'acteurs tend à consolider la richesse dans un nombre faible d'acteurs bénéficiaires de ces changements. Ceux-ci sont:
- d'un côté les financiers contrôlant les entreprises leaders de ces secteurs
- d'un autre côté les entrepreneurs visionnaires à la têtes de ces leaders ou créateurs de nouvelles entreprises innovantes
- finalement les individus ayants les capacités nécessaires à avoir des postes à responsabilités dans ces entreprises.
Laurent Alexandre dans son talk au TEDxParis, prend l'exemple de la valeur relative de la société WhatsApp, 55 employés, racheté 17Mds$ par Facebook et celle de Peugeot, 100 ans d'existence, 100000 employés, valant 12Mds$.
Comme l'a montré Piketty dans son livre "Le Capital au XXIème siècle", ces dernières années ont concentré la richesse chez les 1% voire 0,01% de plus riches comme jamais auparavant, les niveaux d'inégalités atteignant ceux du 19ème siècle en Europe.
Les changements technologiques disruptifs "big bang disruptions", combinés au contrôle financier peuvent faire atteindre des niveaux de contrôle de la technologie sans précédent par les leaders du secteur numérique. En quelques années les sociétés de la Silicon Valley ont pris le contrôle de nos téléphones mobiles (Apple, Google) qui sont devenus la porte d'entrée de nos vies numériques.
Les investissements récents de ces acteurs et en particuliers ceux de Google montrent une volonté de ces acteurs d'être présent dans de plus en plus de secteurs:
- Voiture automatique (Google Car)
- Santé (Apple Watch)
- Robotique et Intelligence artificielle (Achat par Google de 8 pépites)
- Energie (Google Nest)
- Amazon (livraison par Drones)
- Réalité Virtuelle (Facebook - Oculus Rift, Google Glass)
Le numérique est partout ("Software is eating the world" dit Marc Andreesen) et va avoir un potentiel impact dans l'ensemble des métiers, pouvant déstabiliser toutes les industries actuelles. En plus nous n'avons encore rien vu comme l'expliquent Erik Brynjolfsson et Andrew Mac Afee dans Second Machine Age (Voir aussi le talk TED Race with the machines).
Avec l'état de la domination de la Silicon Valley sur le reste du monde en matière technologique, un rebattement des cartes de ce type ne pourra pas avoir pour effet autre que de renforcer le pouvoir de celle-ci au détriment des autres régions du monde.
Même si nous arrivions à innover et investir suffisamment pour développer des acteurs significatifs ou conserver des leaders dans les secteurs touchés par la transformation numérique, il est peut probable que nous puissions enrayer la concentration à l'oeuvre au profit des gagnants. Une particularité du secteur du numérique et une forte tendance au "Winner takes all".
Le numérique est une infrastructure de base comme le sont l’énergie ou les transports.
Sans un accès très large aux technologies innovantes numériques de façon libre et ouverte, les distorsions économiques seront significatives.
Il est fort probable que les technologies clés, comme les infrastructures Cloud, l'intelligence artificielle, les services numériques de communication soient sous contrôle monopolistique ou oligopolistiques dans les années à venir.
Jeremy Rifkin dans son livre "Zero Marginal Cost Society" prédit une avènement des "Commons" et de l'économie collaborative, et même si de grandes initiatives sont en marche dans ce domaine, on voit surtout des acteurs numériques privés de plus en plus puissants qui contrôlent de plus en plus les outils numériques que nous utilisons. Des technologies un jour ouvertes sont "vendues" ou "financées" et petit à petit refermées.
Cependant nous avons besoin de pouvoir construire sur les innovations numériques une économie libre et ouverte. Il est nécessaire de garantir un fonctionnement le plus ouvert et libre de l'économie numérique, permettant une concurrence équitable et ouverte aux nouveaux entrants.
Nous pouvons bien sûr croiser les doigts et espérer soit disposer dans le futur de quelques leaders en Europe dans le domaine numérique ou encore que la pseudo-concurrence libre actuelle soit suffisante pour que les choses aillent dans le bon sens, mais personnellement je n'y crois pas.
Pour moi il est nécessaire de considérer le numérique comme une infrastructure et de prendre des mesures significatives pour assurer la liberté d'accès et de concurrence dans ce domaine.
Quelles sont les conséquences une fois que l'on a dit cela. Concrètement cela veut dire que l'Etat doit assurer un libre accès aux connaissances et technologies numériques, et possiblement s'impliquer et s'assurer que toutes les briques de base sont disponibles afin que les entreprises et les citoyens puissent construire sur ces technologies, que ce soit pour construire des entreprises privés, des projets associatifs, ouvert ou personnels.
Pour cela on doit protéger les acquis de "l'open" et continuer et renforcer les actions en faveur des technologies libres et ouvertes:
- Pas de brevets numériques, ce qui est le cas en Europe (mais pas aux USA), ni de combinaison de brevets incluant des technologies numériques.
- Aide par l'état des modèles d'entreprises Open (1% open proposé par WithoutModels, exemptions fiscales).
- Valoriser les critères Open Source dans les appels d'offres publics en rendant obligatoire de justifier tout recourt à un logiciel propriétaire.
- Continuation et renforcement de l'investissement par l'état dans la recherche dans le domaine des technologies numériques et publication en Open Source des briques de bases manquantes des technologies numériques du futur (Intelligence artificielle, robotique, etc..).
- Libre accès aux publications scientifiques publiés dés leur sortie de façon libre (nous en n'y sommes pas encore en France au vu de cet article).
- Garantir l'accès libre aux données et aux services par API documentées publiquement pour tout utilisateur ou client qui le souhaite et souhaite connecter un logiciel tiers.
Vous trouverez plus de propositions en ce sens sur le site de Without Models.
Vers une fin de la Propriété Intellectuelle, l'Open Source obligatoire ?
Mais il faudra probablement aller plus loin et se poser la question de la fin de propriété intellectuelle (dans le domaine du numérique), car si un temps la propriété intellectuelle a permit d'encourager la création en permettant à un créateur de "protéger" son invention afin d'avoir un revenu associé et ainsi d'avoir une incitation à créer, aujourd'hui la propriété intellectuelle est devenu un frein à la création et à la libre concurrence.
La propriété intellectuelle est un frein car on ne peut plus créer en dehors des écosystèmes actuels. Ainsi les modèles de créations doivent s'appuyer sur les systèmes existants contrôlés par des acteurs privés puissants. Les entreprises deviennent ainsi des proies faciles pour ces acteurs. Aujourd'hui vous choisissez Apple ou Google et vous obtenez une solution intégrée qui ne laisse pas beaucoup de place pour les acteurs voulant "modifier" le comportement du système, et ce malgré les App Store et le fait qu'Android soit ouvert (effectivement Google contrôle toutes les applications et les services Cloud clés dans le système Android).
La propriété intellectuelle est un frein à la libre concurrence, puisque des technologies clés sont protégées et il n'est pas possible de construire sur ces technologies sans un effort important pour rattraper le retard technologique.
Aujourd'hui la vitesse de création étant plus rapide que la capacité des individus à assimiler les changements, est-il vraiment nécessaire de favoriser la création ? Ne sera-t-elle pas largement suffisante sans ajouter une protection longue dans le temps qui donne un avantage démesuré aux leaders.
Bien entendu c'est une question complexe, car la propriété intellectuelle protège aussi les petits acteurs des grands, et le droit de "copier" risque de ne pas être suffisant, puisque le développement logiciel peut être fermé et non accessible.
Peut-être faudrait il rendre l'Open Source obligatoire, ce qui permettrait une vraie concurrence et libre accès au marché puisque de nouveaux acteurs pourraient se construire utilisant les briques développés par les acteurs leader du marché.
Évidement ce n'est pas une mince affaire même pour l'Open Source lui-même, car une portion significative du code libre à été crée par des acteurs gardant une partie de leur code privé, mais les enjeux sont significatifs, car le numérique est une infrastructure et ne pas assurer le libre accès à cette infrastructure veut effectivement dire qu'on laisse le contrôle de notre économie aux leaders technologiques.
Ce billet est aussi contribué à la consultation du CNNum.
Mes contributions à la consultation sur le numérique du CNNum
Voici un premier jeu de contributions que j'ai posté sur le site de la consultation du Conseil National du Numérique sur le numérique en France. Il ne s'agit bien sûr que d'un début et j'espère pouvoir en faire d'autres.
Financement des entreprises
Dans la section Financement des entreprises, j'ai posté une cause sur un sujet qui me tient à coeur et pour lequel j'espère faire quelques propositions.
Cause: Le Financement par le Capital Risque crée des entreprises numériques déjà vendues aux acteurs US
Le financement par le Capital Risque demande une stratégie de "sortie" à 5 ou 7 ans. Or dans le contexte actuel de la technologie, les seuls sorties sont principalement la revente à un acteur en général dominant. L'absence d'acteurs Français et Européens de taille significative réduit fortement les chances de voir les startups ainsi financées de rester Européennes.
Le cas de Daily Motion était un bon exemple de cette situation, ou aucun n'accord n'a pu être trouvé protégeant à la fois les intérêts Français et les intérêts de Yahoo (qui voulait la majorité). Comme l'on clairement signalé les acteurs du Capital Risque, le refus de vendre à lancé un mauvais signal aux investisseurs, montrant que la possibilité de revente aux USA est un argument clé pour l'investissement par Capital Risque.
Beaucoup de startups sont par ailleurs poussées à se lancer sur le marché US en priorité, en installant le centre de décision aux USA, renforçant encore plus la sortie aux USA. Souvent elles gardent des centres de R&D en France, montrant par la le bon fonctionnement des aides à l'innovation sur la partie R&D.
Le FSI donne la possibilité à l'Etat d'avoir un mot à dire pour certaines des startups dans lesquels ils sont investis, mais avec les problèmes d'interventionnisme que cela pose.
Mais l'efficacité de ces aides est alors réduite fortement si le résultat est dés le départ une startup qui finira dans un grand groupe américain, et ce même si quelques bénéfices collatéraux existeront (formation des individus, retour sur investissement qui pourra être réinvestis, nouveaux business angels qui pourront accompagner des startups). Et Surtout, ce modèle empêche toute émergence d'acteur Européen de taille significative permettant de consolider les acteurs locaux pour faire un leader mondial.
Quels mode de financement pourront éviter la fuite des startups "à priori" ? Quels sont les méthodes qui permettraient de créer des acteurs Européens de taille significative en alternative aux reventes aux leaders américains ?
Critères du MQ "Social Software": pourquoi ne pas compter les installations Open Source ?
Suite à l'article de Claude Super sur son blog et un échange sur twitter, j'ai posté le commentaire suivant que je re-poste ici:
Il est important de noter que contrairement aux années précédentes une nouvelle règle est apparue:
"excluding freemium and open-source users" et "excluding freemium and unsupported open-source users"
et que les critères de revenus ont été largement boostés: 12M$
Ceci est particulièrement "éliminatoire" pour beaucoup d’acteurs en particulier de l’Open Source. C’est très dommage d’éliminer d’entrée des acteurs:
1/ Acteurs qui peuvent avoir un bon produit mais qui n’est pas encore vendu. La case "visionaires" est ainsi particulièrement vide.. D’ailleurs j’ai de forts doutes sur ce critère de chiffre d’affaires pour les acteurs non "pure-players" qui devraient faire les critères uniquement sur la partie Social Software. Est-ce vraiment le cas ici. On ne le saura pas. Il est dommage d’avoir des critères de CA trop durs car forcement cela favorise les fournisseurs avec des produits chers. Est-ce vraiment ce que cherchent les utilisateurs ?
2/ Pour les acteurs Open Source c’est une attaque sur le modèle que de ne pas compter les installations "unsupported". La base du modèle open source est une stratégie moins marketing et plus "produit" basé sur une base installé gratuite importante et ensuite une transformation en clients "payants". En final forcement un acteur Open Source sera plus petit sur sa partie payante mais peut-être largement plus important sur sa partie gratuite, sans compter que les clients "gratuits" peuvent être supportés par d’autres acteurs (société de service, self-support avec des équipes de haut niveau, etc..). L’ajout de ce critère favorise fortement les acteurs propriétaires, or l’Open Source est de plus en plus présent dans les grandes DSI (cible principale de ces rapports). Cherchez l’erreur.
Sans compter les critiques concernant la présence des "clients" de Gartner. Il est clair que Gartner est payé des deux côtés, par les utilisateurs et par les éditeurs. Aux utilisateurs de se faire un avis sur le fait que le Gartner est objectif.
Si je suis mauvaise langue je dirais que les éditeurs avec un faible chiffre d’affaires n’intéressent pas trop le Gartner, mais la vraiment je serais mauvaise langue.
Oui ces études sont très utilisés par les DSI. Il est donc important de s’assurer qu’elle ne soit pas biaisées ou en tout cas d’informer les lecteurs sur ces biais.
A noter qu’XWiki à été dans le "quadrant" dans le passé pendant 2 ans (et nous avons même été client une année du Gartner). Aujourd’hui au vu des critères nous ne pouvons clairement pas y être. Pour être objectif, je ne pense pas que nous y serions même avec des critères plus "relax" sur le CA et plus ouvert à l’Open Source. Par contre je pense que fonctionnellement notre produit est au niveau et répond à beaucoup des besoins des entreprises dans ce domaine (même si la notion de Social Software reste floue).
Les Talents du Numerique 2014: une réussite !
Hier, j'étais présent à l'événement "Les Talents du Numérique" organisé par le Syntec Numérique.
Un tweet résumant l'événement :
Le @syntecnumerique drague les djeuns ce soir à #lestalentsdunumerique ou les grands patrons lâchent leur 06 !! pic.twitter.com/8YhoS5VCYJ
— jean-luc beylat (@jeanlucbeylat) 4 Juin 2014
Plus sérieusement, c'était un très bon événement qui a mis en avant des entrepreneurs du numérique afin qu'ils partagent leur experience ainsi que des projets de jeunes avec une remise de prix pour les meilleurs projets.
A noter en particulier la catégorie "Utopie" présentée par Tristan Nitot montrant des projets ayant l'ambition de "changer le monde".
Il est en effet important pour nous et nos jeunes de continuer à avoir cette ambition, même si comme l'a indiqué Céline Lazorthes de Leetchi "on veut changer le monde, mais bon on commence par changer l'ampoule".
L'objectif de l'événement était de mettre en contact des jeunes avec le monde du numérique et de ce point de vue c'était très réussi, puisque certaines écoles sont venues en force, dont l'EPITA, l'EPSI et la Webacademie.
C'était sympa de discuter avec les étudiants, d'autant plus que nous avons pu rencontrer pas mal d'étudiants intéressés par le monde du logiciel libre, même s'il leur paraissait surprenant d'avoir en face d'eux une entreprise créant du logiciel libre. Nous avons eu droit à l'habituelle question : "mais qu'est-ce que vous vendez ?"
Il est donc important de rappeler: "Le logiciel libre n'est plus une utopie, il y a des jobs !"
Aujourd'hui le logiciel libre emploie de plus en plus de personnes, aussi bien dans des entreprises non technologiques afin de les mettre en oeuvre, dans des sociétés de services spécialisées en Open Source et surtout chez des éditeurs de Logiciels Libres.
Et si vous voulez que votre travail puisse directement ou indirectement contribuer à avoir plus de code libre dans le monde, regardez les éditeurs de logiciels libres de près.
Chez XWiki SAS, nous payons 10 personnes (sur 38) qui produisent (ou testent) presque à temps plein du code XWiki ou des extensions XWiki (soit plus de 25% directement en contribution au logiciel libre).
Et ceci n'inclut pas les contributions réalisées par d'autres employés dans le cadre de projets ou du support pour des clients !
Ceci est possible grâce aux services que nous réalisons pour nos clients, lesquels participent au financement de notre contribution aux logiciels libres, ainsi que des aides pour des projets de recherche français ou européens.
Si vous voulez en savoir plus, XWiki SAS ouvre ses portes le 13 juin en participant à la Startup Assembly. Venez nous rencontrer, inscrivez-vous !
Ludovic Dubost
Impacts d'Internet et des Nouvelles technologies sur la société: nous n'avons encore rien vu
Depuis le début de ma carrière j'ai été attiré par la technologie et par les possibilités apportés par l'Internet. Dés mon premier emploi j'ai voulu travailler dans ce domaine.
J'ai eu la chance depuis 1995 de participer à de grandes innovations, d'abord autour d'Internet et maintenant avec XWiki au mouvement du logiciel libre.
Internet, les Logiciels libres, les technologies ont eu un impact important sur la société. Aujourd'hui un enfant va dés son adolescence vivre dans un monde connecté. Il pourra passer des années loin de son pays en restant en contact avec celui-ci. Il pourra accéder à des ressources éducatives presque infinies. Il pourra commander n'importe quel produit en ligne et se le faire livrer. On a vu une nouvelle économie naître et prosperer. Il est possible aujourd'hui pour une entreprise de vendre dans le monde d'entier de son salon. Du côté de 'l'ancienne économie' il y a des impacts mais ceux-ci sont encore presques légérs, probablement plus lentement que ce qu'on imaginait en 1990.
Pour autant je pense qu'aujourd'hui nous n'avons encore rien vu des changements que l'innovation technologique va avoir sur la société. Les impacts sur l'ancienne économie s'accélèrent. De nouveaux modèles d'affaires continuent à emerger non seulement dans le monde des technologies mais surtout dans le monde non-technologique. Les innovations continuent à affluer et des choses qu'on ne pensait pas possible il y a 10 ans le sont dés aujourd'hui.
Récemment j'ai lu quelques livres vraiment intéressant sur ces sujets:
- Zero Marginal Cost Society de Jeremy Rifkin
- Race against the Machine et The Second Machine Age d'Eric Brynjolfsson et Andrew McAfee accessible aussi en slides sur le site de la Maison Blanche
Ces livres disent la même chose sur la technologie. Les possibilités offertent par la technologie affluent plus vite qu'on le pense et les changements sur la société et l'économie risquent d'être plus rapides que sa capacité à absorber des changements brutaux.
Pourquoi les possibilités technologiques affluent de façon accéléré ?
...
Lettre ouverte à nos députés et à Axelle Lemaire: coup de Gueule contre les lois absurdes sur les stages
Depuis quelques années, régulièrement de nouvelles lois sont votées pour encadrer encore plus les stages en entreprise:
- stage de moins de 3 mois rémunéré à un tarif minimum et maintenant moins de deux moins
- règles indiquant qu'un stagiaire ne peut pas remplacer un salarié
- règles indiquant qu'un stagiaire doit avoir les mêmes droits qu'un salarié (Tickets Restaurant, horaires, etc..)
- pas de stage sans convention tri-partite
Il a même été évoqué un taux maximum de stagiaire en entreprise (10%).
Finalement si on veut fermer la porte des entreprises aux jeunes, c'est parfait et c'est exactement ce qu'on fait avec ce type de loi.
...
Liste des 100 développeurs de Tariq Krim
Tariq Krim a rendu son rapport sur les talents à Fleur Pellerin la semaine dernière.
La "liste" était attendue comme le loup blanc depuis le billet de Tariq la french touch du code et après les critiques qui ont fusées sur la pertinence d'une telle liste et les méthodes de selection qui seraient utilisées.
J'ai l'honneur d'avoir été inclus dans cette liste avec nombre d'autres libristes et entrepreneurs / développeurs et de voir à travers cela XWiki reconnu d'une nouvelle façon.